Airbnb qualifié d’éditeur : le Tribunal judiciaire de Paris durcit de nouveau le droit des plateformes

11 juin 2020 | Actualités

Par un jugement du 5 juin 2020, le Tribunal judiciaire de Paris a reconnu Airbnb « responsable des actes commis par ses utilisateurs sur sa plate-forme ». C’est la première fois que la société de mise en relation d’hôtes et de voyageurs est condamnée solidairement avec l’hôte ayant proposé illicitement un bien sur le site.

Selon le tribunal, Airbnb, en s’abstenant de vérifier la légalité de la transaction, a eu « un comportement fautif » participant « au préjudice subi par la bailleresse ». Il est ainsi, au même titre que la locataire ayant sous-loué son bien en fraude des droits de son bailleur, reconnu comme responsable de sous-location frauduleuse.

C’est en s’appuyant sur les conditions générales du site que le Tribunal justifie sa décision. Celles-ci donneraient des directives aux hôtes « être réactif, accepter les demandes de réservation, éviter les annulations, maintenir une bonne évaluation globale et fournir des équipements de base, et le non-respect de ces directives peut aboutir à un retrait du contenu et/ou des pénalités ».

Le Tribunal relève que « Il est contractuellement prévu que l’hôte, en publiant du contenu sur AIRBNB, accepte de se conformer à ces règles et que AIRBNB se réserve le droit de retirer tout contenu partiellement ou en intégralité qui ne respecte pas ces règles ».

La promotion des « superhost », qualité attribuée automatiquement par un logiciel si l’hôte remplit les critères définis, est également pointée par le jugement pour justifier la qualification d’éditeur.

Selon les juges, « l’ensemble de ces éléments témoigne du caractère actif de la démarche de la société AIRBNB dans la mise en relation des hôtes et des voyageurs et de son immixtion dans le contenu déposé par les hôtes sur sa plate-forme ». Elle aurait ainsi un véritable « droit de regard sur le contenu des annonces ».

De nouveau, le business model même des plateformes est mis à mal par les juges qui refusent de les qualifier de simple intermédiaire technique. Si cette jurisprudence devait être confirmée, elle imposerait à Airbnb d’effectuer un contrôle a priori de la légalité de l’ensemble des annonces et locations proposées par l’intermédiaire de son site internet.

Cette décision impose également de prendre un soin tout particulier dans la rédaction des conditions générales de sa plateforme pour éviter une qualification d’hébergeur et une éventuelle responsabilité solidaire quant aux activités réalisées par son biais.

Airbnb a d’ores et déjà indiqué faire appel de cette décision. A suivre donc…