La mode est aux brevets d’usage. Présentés comme la solution des startups face à un droit des brevets traditionnel peu adapté, ils seraient un potentiel de valorisation pour l’économie de l’innovation. Le brevet dit d’usage (Utility Patent), mis en lumière par la lourde condamnation de Samsung contre Google en 2012, est un droit immatériel importé des Etats-Unis qui protège les fonctionnalités des procédés, machines, produits manufacturés ou toute amélioration portant sur ces éléments[1]. Ainsi, en droit américain et contrairement au régime en vigueur en Europe, une invention est brevetable dès lors qu’elle présente une utilité sociale.
Si le dépôt d’un brevet d’usage a une réelle utilité en cas de commercialisation sur le continent américain ou de recherche de financements outre-manche, son impact demeure encore limité pour les startups se lançant sur le seul marché européen.
En effet, les règles d’extension du Traité de coopération en matière de brevets (PCT) sont strictes et ne permettent pas de contourner les règles internes par une astucieuse utilisation de l’extension internationale d’un brevet national (en l’occurrence américain). Si le PCT permet de de solliciter la protection d’une invention simultanément dans de nombreux pays par une demande unique, chaque demande est étudiée par les offices nationaux au regard des règles nationales.
Ainsi, un brevet d’usage accordé par l’USPTO (office américain de la propriété intellectuelle) ne sera pas nécessairement converti en un droit français ou européen par l’office saisi suite à une demande d’extension. Encore faut-il qu’il remplisse les conditions de brevetabilité françaises (selon la définition donnée par l’INPI, l’invention doit être une solution technique à un problème technique, être nouvelle et être susceptible d’application industrielle).
Inutile donc de se précipiter vers le brevet d’usage au coût non négligeable avant d’avoir défini au préalable une stratégie claire en matière de commercialisation des biens et service, de recherche de financement et de monétisation éventuelle des droits de propriété intellectuelle.
[1] A titre d’exemple, Samsung a été condamné sur la base de trois brevets détenus par Apple : 381 concerne les listes déroulantes, la traduction de documents, la mise à l’échelle et la rotation sur un écran tactile, 915 concerne la fonction dite « pincer /zoomer », c’est-à-dire le zoom l’activation du zoom en écartant les doigts et 163 qui couvre la fonction de zoom par « double-tap » sur l’écran.