Par un arrêt du 12 novembre 2020, la Cour de cassation a considéré que l’activité de mise en relation de travailleurs indépendants et de clients professionnels ne présentait pas une fraude manifeste à la loi, notamment au code du travail et au code pénal.
Le litige opposait une société de travail temporaire et une agence d’intérim à la société Brigad, société exploitant une plateforme de mise en relation des entreprises de tous secteurs avec des indépendants spécialistes de l’hôtellerie et de la restauration pour des missions ponctuelles et de courte durée. Brigad, comme habituellement ce type de plateforme, met également à disposition un outil générant automatiquement un contrat assorti d’une assurance et la facture et automatisant le paiement.
Les demandeurs lui reprochaient la violation de plusieurs réglementations :
- Les dispositions du code du travail et du code pénal : Brigad aurait utilisé un moyen légal, une plateforme de mise en relation, pour éluder une règle de droit, la réglementation sur le travail temporaire – et, de façon implicite, celle sur le travail dissimulé ;
- Le code de la consommation : Brigad utiliserait des techniques constitutives de publicité comparative trompeuse ;
- Enfin, le modèle serait constitutif de concurrence déloyale en ce qu’il ne permettrait pas aux entreprises de travail temporaire d’être compétitives dans le cadre réglementé qui s’impose à elles.
Selon l’analyse des sociétés de travail temporaire, la plateforme n’aurait pas un simple rôle de mise en relation mais une véritable activité de mise à disposition de main-d’œuvre, activité réservée aux sociétés d’intérim. Les freelances présents sur la plateforme devraient ainsi se voir reconnaître la qualité de salariés.
La Cour de cassation rejette l’analyse, confirmant la position de la Cour d’appel qui a retenu que l’activité des plateformes numériques de mise en relation était encadré par les articles L. 7341-1 et suivants du code du travail et constaté l’absence d’indices suffisants permettant de renverser la présomption de non-salariat prévue à l’article L. 8221-6 du code du travail pour les travailleurs indépendants s’y inscrivant.
Attention, il convient d’être prudents et d’attendre la décision de fond avant de réellement se réjouir puisque le litige avait été porté devant le juge des référés, juge de l’évidence.
La tendance semble toutefois tendre vers une sécurisation du cadre juridique des plateformes de mise en relation de travailleurs indépendants, modèle en plein essor et outil particulièrement apprécié des freelances.
Espérons donc que l’analyse sera prolongée, précisée et confirmée par les juges du fond qui auront certainement à connaître des suites de ce litige.